La société de service public de production et de distribution de l’eau potable, en proie à des difficultés d’approvisionnement à Yaoundé, cherche des boucs émissaires.
« En vue d’assurer une meilleure desserte en eau et continuer à couvrir nos charges incompréhensibles (salaires, produits de traitement, maintenance des stations de production…), j’ai l’honneur de solliciter, sauf meilleure appréciation, le paiement du reliquat des créances de consommations d’eau des administrations publiques des années 2018, 2019, 2020 et 2021 s’élevant à 4 300 000 000 FCFA. En rappel, les créances engagées pour le compte du premier semestre 2022, 6 000 000 000 FCFA notamment, sont aussi en attente de paiement, pour un total d’impayés de 10 300 000 000 FCFA. Veuillez agréer, monsieur le ministre, l’expression de ma haute considération », écrivait le directeur général de Camwater, le 10 août 2022. Un mois plus tard, face à la polémique suscitée par la crise de l’eau du robinet dans de nombreux quartiers de Yaoundé, Gervais Bolenga oriente les regards vers les ministère des Finances, destinataire de sa correspondance.
La société publique en charge de la production et la distribution de l’eau potable au Cameroun réclame 10,3 milliards de FCFA à l’État du Cameroun au titre des impayés des factures d’eau consommée par l’administration publique à fin juin 2022. Mais cette créance due par les services publics de l’Etat ne représente que 1/6 de l’ensemble des impayés inscrits dans les livres de Camwater. D’où la campagne de recouvrement lancée fin novembre 2021 avec l’objectif d’engranger le maximum des plus de 61 milliards détenus par les débiteurs de l’entreprise au titre des impayés de facture.
En effet, l’Etat n’est pas seul à devoir. Il faut aussi aligner sur la liste des débiteurs, les particuliers (+23 milliards). Près de 4,5 milliards de ces fonds sont dus par des particuliers dont le contrat a été résilié, ce qui hypothèque fortement la probabilité de recouvrement de cette créance. Les collectivités territoriales décentralisées (CTD) avec plus de 3 milliards de FCFA, et Eneo (836 millions) rallongent la liste des débiteurs. Les gros consommateurs actifs détiennent, quant à eux, 2,363 milliards de FCFA.
La campagne de recouvrement de Camwater cache mal les difficultés de l’entreprise à fournir le service publique de l’eau potable. Déjà en déficit de production depuis plusieurs années, déficit accentué depuis quelques mois à cause des dysfonctionnements enregistrés à Akomnyada, principal station de production d’eau pour l’alimentation de Yaoundé, Camwater est en déficience de distribution, comme le déplorent les consommateurs. Certains postent sur internet des vidéos des désagréments subis à cause du manque d’eau.
En début septembre, en pleine crise d’approvisionnement en eau et pendant que les populations criaient soif, Camwater avait surpris en révélant la vol de près de 1 000 compteurs clients. Un problème sans doute, mais qui ne répond pas à la préoccupation centrale des clients : la mise à disposition permanente de l’eau potable, service public.